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« Allo Cétacés ! » : les dauphins expriment leur dérangement…

Etude d’impact acoustique et éthologique 
sur les populations de dauphins à long bec

(Stenella longirostris) à Tahiti 
Evaluation de l’impact des activités d’origine anthropique 

Pour la Direction de l’environnement de la Polynésie française
Réalisée par
Dr BENET Agnès Biologiste marin
Dr Virginie SCANGA, vétérinaire

RESUME

Les dauphins à long bec (Stenella longirostris) trouvent régulièrement résidence dans de nombreuses baies et passes des îles hautes et des atolls. Ces cétacés sédentaires viennent se reposer, se sociabiliser et se reproduire dans les baies, le plus souvent toute la matinée, avant de repartir pêcher en mer. Ce sont donc des moments importants dans le cycle de vie d’un dauphin.
Leurs visites régulières attirent l’attention des passionnés des dauphins pour le loisir ou pour les activités commerciales. Nous constatons une augmentation des visites en bateau, jet ski ou à la nage d’année en année, essentiellement dans la Baie de Punaauia, située à Tahiti, à seulement 10 minutes en bateau de la Passe de Taapuna. Dans ce contexte d’une activité grandissante, une étude en acoustique a été réalisée pour la Direction de l’Environnement de la Polynésie, enregistrant les variations des signaux acoustiques émis par les dauphins lors de situations de stress ou non afin d’évaluer les situations dérangeant les animaux.

QUELQUES RESULTATS (extraits du rapport BENET.A. 2017. Etude d’impact acoustique et éthologique sur les populations de dauphins à long bec (Stenella longirostris) de la baie de Punaauia (Tahiti) : Evaluation de l’impact des activités d’origine anthropique. PROGEM. Direction de l’Environnement de la Polynésie française. Rapport final. 53 p.) L’intégralité de l’étude est à la DIREN dont voici quelques extraits. L’ensemble est consultable à la DIREN de Papeete.

Extrait de l’étude réalisée pour la DIREN
Extrait de l’étude réalisée pour la DIREN
Extrait de l’étude réalisée pour la DIREN

Les dauphins à long bec de la baie de Punaauia, comme leurs congères des autres régions du monde, fréquentent la baie le matin essentiellement pour se reposer (79 %). On appelle repos chez les cétacés, l’équivalent du sommeil chez l’Homme.

63 % des bateaux à moteur et 80 % des jets skis fréquentant cette zone ne respectent pas les règles d’approche des cétacés et occasionnent un changement de comportement des dauphins (fuite, changement de fréquence respiratoire, etc.)

La pression la plus observée sur les dauphins est relative à la pourchasse qui est aussi bien effectuée par les bateaux à moteur que par les jets skis.

Alors que la vitesse réglementée est de moins de 3 nœuds dans un rayon de 300 mètres des cétacés, 14% (bateaux à moteur) et 19% (jets skis) dépassent les 10 nœuds.

Le temps de résilience (temps nécessaire au dauphin pour revenir à son comportement avant la perturbation) est d’environ 20 minutes. 

Lorsque les dauphins sont au repos et régulièrement dérangés, leur repos peut être entre-coupé de plus d’1h par les perturbations + temps de résilience.
Si les perturbations s’enchainent toute la matinée, le temps de repos des dauphins devient inexistant.

Extrait de l’étude réalisée pour la DIREN

Les perturbations induites par l’Homme entrainent des modifications de la communication des dauphins, que nous avons enregistrées à l’aide d’un hydrophone.

Extrait de l’étude réalisée pour la DIREN

Influence de la pression anthropique sur les sifflements des dauphins pendant la phase de repos.

CONCLUSION 

L’ensemble de ces résultats démontre que les dauphins à long bec de la baie de Punaauia peuvent montrer des signes de modification de leur communication inter-individus. En effet, les animaux sont obligés de modifier leur communication (fréquence, forme et nombre de sifflements) à cause d’une augmentation générale du bruit ambiant, ce qui indique qu’ils sortent de leur zone de confort ; il s’agit donc d’une réponse à une gêne occasionnée.
En associant les résultats acoustiques à ceux du comportement des embarcations à moteur sur ce site, à savoir, plus de 63 % des bateaux et 80 % des jets skis fréquentant la zone qui ne respectent pas les règles d’approche avec différents pressions anthropiques induites (voir figures ci-dessus), les perturbations occasionnées alertent sur le dérangement répétitif et régulier dans cette zone.